📚 PHILIP K. DICK - LES CHAÎNES DE L'AVENIR (THE WORL JONES MADE, 1956)

📚 PHILIP K. DICK - LES CHAÎNES DE L'AVENIR (THE WORL JONES MADE, 1956)


Quatrième de couverture
Jones revoyait l'avenir. Non pas à la façon vague d'un diseur de bonne aventure, mais de manière précise, dans tous ses détails. Il se souvenait de l'avenir. L'ennui, c'était que son don était limité à une année. Et le drame, c'était qu'il ne pouvait rien changer à ce futur certain. Il savait ce qui allait lui arriver. Et ce qui allait arriver à toute l'humanité en un temps où d'étranges créatures, les dériveurs, tombaient de l'espace interstellaire sur toutes les planètes du système solaire, y compris la Terre. De quoi devenir un Prophète, un Messie, bouleverser l'ordre déjà ébranlé d'une Terre mal en point et la charger des chaînes de l'avenir. Pour l’Éternité ?
 

Les lecteurs de PKD sont rarement occasionnels. L'engouement que génère cet auteur est à la hauteur de ses écrits. Pourtant, il faut admettre que s'il est un excellent et incontournable novelliste (je ne cesse de le crier haut et fort), ces romans sont beaucoup plus irréguliers. Cela est dû à des textes courts que l'auteur, pour des raisons souvent alimentaires, parfois plus noblement justifiées, transforme en version longue et ce n'est pas toujours réussi. En 1956, quand PKD publie Les chaînes de l'avenir, il a déjà écrit bon nombre de nouvelles mais seulement deux ou trois romans. Loterie solaire qui passe pour être son premier roman fait les frais d'une idée de départ très bonne, tout comme il le fera en 1967 avec 👉 À rebrousse-temps (deux romans construits exactement de la même manière), mais qui s'essouffle à la moitié du récit. On peut presque leur préférer Les pantins cosmiques (1957), seul roman fantastique de l'auteur, de facture très classique mais efficace qui a peut-être influencé le grand Stephen King (il faudrait lui demander ).
Les chaînes de l'avenir se présentent alors comme étant le premier roman vraiment abouti de l'auteur même s'il souffre encore d'imperfection. La faute en incombe sûrement à avoir voulu y intégrer beaucoup d'idées qu'il faut ensuite pouvoir suivre. Or, contrairement à ce que j'ai pu lire de critiques peu élogieuses, je trouve que compte tenu du démarrage approximatif de l'auteur dans le domaine du texte long, celui-ci est rondement bien mené car il retombe sur ses pieds et la fin est digne d'une très bonne nouvelle « à chute ».
Parce que ce roman traite autant de précognition, de génétique, de mutants, de Vénus, d'une Terre dévastée par la guerre, de totalitarisme, d'exploration spatiale que d'organismes interstellaires, tout cela déjà dans un décor futuriste à la Blade Runner, on peut aisément dire que tous les jalons de l’œuvre dickienne sont posés ici.
Mieux encore, le roman se lit d'une traite, sans temps mort, sans relâchement et sans jamais saboter chacune des idées exposées (contrairement à Loterie solaire, ou pire, à À rebrousse-temps). Parmi les passages les plus intéressants, on peut retenir la scène de la boîte de nuit avec le couple d'hermaphrodites qui passent à leur convenance d'un sexe à l'autre. Un autre passage m'a renvoyée au roman de Frederik Pohl, 👉 L'homme-plus, pour la similitude des expériences scientifiques qui consistent à modifier l'Homme pour le rendre adaptable à un environnement nocif. Si pour Pohl, il s'agissait de Mars, ici il faut permettre à une nouvelle espèce d'humains, adaptés pour la circonstance, de vivre sur Vénus.
La difficulté du roman pour l'auteur a été sans doute de s'enfermer avec un personnage doué de précognition. Sa capacité à voir un avenir limité à une année sans pouvoir le modifier, impose un déroulé prédéfini, immuable qu'il a dû être difficile de maintenir au risque de se heurter à des paradoxes ou à des incohérences. Dire qu'il n'y en a pas serait sans doute un peu surévalué, mais je n'ai rien vu de notable.
Finalement, PKD se sort assez bien de cet exercice qu'il renouvellera souvent, en se laissant néanmoins plus de liberté, dans de nombreuses nouvelles impliquant le Temps ou/et la précognition (Minorité Report, L'Homme doré etc...) Alors oui, il manque peut-être un peu d'émotion, un petit quelque chose qui fait que ce n'est pas un chef d’œuvre mais bon, il l'est sans aucun doute.


Philip K. Dick Les chaînes de l'avenir ♥♥ (The world Jones made, 1956) • J'ai Lu
 


Crédits images, textes ©2014-2021 Erwelyn - Article publié sur l'ancien blog de la librairie Soleil Vert en juin 2014 et mis à jour en février 2021 - Ne pas reproduire sans autorisation

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